Notes pour COMMENCER – Juillet 2009




01.07.09. 19h00. Place du Bouffay. Arno. Lui donner les courriers de l’Impossible, pour Adeline et pour lui. Il me parle de la horde, un jeu auquel il participe sur Internet. Il me parle de Périgueux, là où il va vivre prochainement, là où ils vont vivre prochainement. Il me parle d’une photo prise dans une usine. J’y suis de dos. Il me propose de me la donner. Avoir cette photo chez moi. Non. Même de dos.

02.07.09. 17h00. Donner le courrier de l’Impossible à Soizic. 20h00. Ensemble Phœnix à Pol’n. Matthieu. Maud. Une violoniste.

03.07.09. Il y a ceux qui veulent le Pouvoir, il y a ceux qui ne le veulent pas. Parmi ceux qui ne le veulent pas, il y a ceux qui se cachent, il y a ceux qui font les choses. Ceux qui veulent le Pouvoir se cachent dans l’action de prise ou de conservation du Pouvoir. Ceux qui ne veulent pas le Pouvoir et font, en plus de faire, veulent que tous ceux qui se cachent cessent de se cacher. Veulent que tous ceux qui se cachent [soit dans la prise de Pouvoir, soit dans la conservation du Pouvoir, soit dans la soumission au Pouvoir] cesse de se cacher. La guerre a lieu entre ceux qui font et ceux qui ont ou veulent avoir. Les uns sont prêts à tuer pour la victoire. Les autres ne veulent pas la victoire. Les autres veulent que tous accèdent à ce qui, libre en eux, défait la victoire. Ils le veulent en premier lieu pour eux-mêmes, et combattent en premier lieu en eux-mêmes. Ce libre en chacun d’eux ne tombe pas du ciel. Je répète : ne tombe pas du ciel. Ce combat qu’ils mènent en chacun d’eux convoque un mouvement par lequel il leur faudra sortir d’eux-mêmes. Ce mouvement aspire à la justice dans la liberté. Ils ne se font guère d’illusions sur la possibilité de la réalisation d’un telle idée. Ils ne feront cependant aucune concession par les actes à ce qui viendrait affaiblir cette idée. Ils s’y efforceront, du moins. Toute perspective de concession participera de la guerre qu’ils savent avoir à mener en eux-mêmes, et hors d’eux-mêmes, dans le tremblement d’avoir à la mener hors d’eux-mêmes. Tant que ceux-là [nous] [qui disons vouloir que tous accèdent à ce qui, libre en eux, défait la victoire], tant que ceux-là, nous, tant que nous penserons en terme de guerre, ceux qui veulent le pouvoir accumuleront les victoires. 10h30, Olivier, rue des Olivettes, Nantes. Voiture. Rennes. Scaramouche. Gwenaëlle. Yann. Régis. La revue Du Nerf. Soirée à Alphagraph. Grand manque de travail. Belle soirée cependant.

04.07.09. Rochefort sur Loire. Marché de la poésie. La maison de notre hôte en bord de Loire.

05.07.09. Rochefort sur Loire. Retour seul chez soi. Tout reste à faire.

06.07.09. ‘‘Dans les moments où la dynamique politique des révolutions ne parvient plus à inventer son devenir, à l’affirmer pour lui-même.’’ Page 19. Parménide. L’être est, et le non-être n’est pas. L’événement. Quelque chose se passe dont les conséquences sont incalculables. Page 51.

07.07.09. Soirée chez Ann’Lise et Jean-Marc.

08.07.09. Après-midi avec Guillaume. Ce qui secret, Internet. Dîner avec Christine et Guillaume et leurs deux filles et le compagnon de l’une d’entre elles. Marie et Gabrielle. Gabrielle il y a quelques jours en terrasse du café de l’île. Les techniciens du spectacle à la table derrière. Véranda sur jardin, rue du Maine. Famille. La parole qui circule. La jeunesse. Les vacances ensemble.

09.07.09. 1. Si le ridicule ne tue pas, le regard qui se pose sur toi, lui, peut tuer. 2. De la générosité. De faire pour les autres. De faire pour soi. 3. De faire plaisir. De répondre. De la possibilité ou non de répondre à l’autre. De la réponse à soi seul. De l’exposition de cette réponse. De la naissance de l’affirmation. Du plaisir. 4. Croiser le faire. Par le regard. Par la parole. Par le corps. Croiser les faire. Combattre. Se battre. S’opposer. Affirmer. 5. Être dans l’opposition. Les opposants sont ceux qui n’ont pas le Pouvoir et le veulent. 6. Avoir la charge de toutes les obligations. Quoi en faire. Les conserver. Les dépenser. Ce ne sont pas mes obligations. Ce sont celles de ceux qui me les ont données. La charge leur revient. À moi l’espace vierge et l’écriture de la nouvelle loi. 7. Ne me fais pas jouir. Ne me fais pas jouir déjà. Ne me fais surtout pas jouir. Tant que je n’ai pas joui l’envie de toi me tient en vie. Ne me fais pas jouir. Jouissons. Jouis. Je. 8. Je veux pouvoir répondre. J’attends que tu m’appelles. Deux phrases pour dire le malheur à l’œuvre. Je veux. Ma propre voix. Écrire. La loi. ‘‘La loi persuade aisément les personnages de leur aptitude à la faire jouir ; à leurs yeux, elle se présente comme l’éternelle insatisfaite.’’ Page 55. ‘‘Le regard qui surveille est l’emblème d’une société ravagée par ses passions tristes.’’ Page 56. ‘‘Hériter, avaler un cimetière, c’est inévitablement entrer dans l’empire des passions tristes.’’ Page 57. 18h30. Un lieu à Nantes pour la résidence Ce qui secret en décembre prochain. 20h30. LLA, la libre association. Le mot désir employé à tort et à travers, suremployé, annulation de sa puissance, de sa nuance, de sa précision, et cependant et certainement au cœur du projet, au cœur de tout projet.

10.07.09. ‘‘La protection politico-sociale de la bourgeoisie repose partiellement sur l’idéologie d’un écart entre les couches moyennes et le prolétariat : toute unité pratique de ces deux groupes seraient mortelle pour le pouvoir de classe du patronat.’’ Page 61. Soir chez Géraldine et Michel. La campagne. Pas vraiment. Les poules. Les œufs. La salade. Le jardin. Les devoirs de l’enfant, le soir.

11.07.09. Suite du 03.07.09. Il n’y a qu’une manière d’être vivant. Très simple. N’être pas avec la mort. Être face aux morts : est une manière d’être de cette unique manière. On dira qu’elle est une manière limite. Il y a deux manières d’être avec la mort. La première consiste à vouloir régner sur les vivants, et à mettre en œuvre toutes les stratégies possibles et imaginables pour faire de chaque vivant un mort. La seconde manière d’être mort est d’opérer la même opération avec soi-même. Ou : de refuser la guerre à mener contre la mort, en soi, et de penser à jamais les tueurs du vivant comme les maîtres de tout. Ce qui secret, revue papier, journée avec Frédéric.

12.07.09. Ce qui secret, revue papier, journée avec Frédéric. Écrire un manifeste. Affirmer. Poser un acte. Première partie de la revue papier : proposition. Deuxième partie : réponse. La proposition est déjà une lecture que nous signons. Ferons-nous nous-mêmes la réponse à notre proposition. Faire la question et la réponse. Écrire une phrase.

13.07.09. Retrouver Michel au Pellerin vers 18h00. Marco. Géraldine. Manger à la Vinaigrerie. Dans le jardin, derrière. La fille de Marco. Les feux d’artifice au loin.

14.07.09. Le refuge. La meute. From here to ear. D’un enfermement l’autre. Les planches de bois là qui ferment, les planches de bois là qui laissent entrevoir l’enfermé, les planches de bois là qui laissent voir l’ouvert, le dehors. L’observatoire. Le paysage. L’enfermement. La meute. La meute de ceux venus voir. L’inversion. L’inversion dedans dehors. Ceux qui regardent. L’animal regardé. Le paysage regardé. Les yeux des hommes et leurs regards dirigés : ils ne savent plus voir. Le refuge. L’eau est dans la maison. Il pleut dans la maison mais pas dehors. Deux bols dans une marmite, un miroir, des livres, un pichet sur la table, les récipients pleins de l’eau ayant pris la couleur du bois. Aller là où l’on ne va pas sans les œuvres. Les œuvres se donnent par là où elles vont, par là où nous allons du fait qu’elles vont. Du mouvement des œuvres, et de ce que nous en faisons. Ici, découverte de la pointe de l’île, à Nantes. Ici, les bords de Loire, à Lavau. Le refuge. Deux fenêtres. Une porte ouverte, deux clés attachées restées sur la porte, l’une dans la serrure. Le refuge, dans l’hôtel du Pouvoir de région. Un tabouret en bois. Une malle en acier. Trois tiroirs de la table sont ouverts, remplis d’eau. Ce que l’eau dégrade. L’eau coule au sol à l’extérieur du refuge. Le marbre faux marbre du sol de l’hôtel du Pouvoir de région. Il y a des vitres aux fenêtres. Il n’y a pas de volets. Il y a de la lumière dans le refuge. Une ampoule sous un abat-jour qui tombe du plafond. Il y a deux projecteurs à l’extérieur qui éclairent l’intérieur du refuge. Il y a un trou dans le mur du fond. Par le trou on voit la fenêtre en face et par la fenêtre la porte d’entrée de l’hôtel du Pouvoir la région et derrière encore, dehors, au pied des arbres, la Loire que l’on ne voit pas d’ici. D’ici l’on voit une barre d’immeuble de Malakoff. L’odeur du bois mouillé. La technique cachée dans un angle du refuge. Cachée mais on l’entend. Mal cachée. Le souffle de la technique. Par les fentes entre les planches, je regarde la jeune femme qui garde l’exposition. Regarder garder. ATTENTION LE SOL EST POTENTIELLEMENT GLISSANT. Si le peuple manque qui sommes-nous. Le bout de l’île. Le parc. Au-delà des voies ferrées, une zone encore sauvage. Lire L’absolue perfection du crime. Prendre un bus. Boire un verre à Bouffay. La pluie. Le frais. Le son du feu d’artifice. Le soir.

15.07.09. COMMENCER.

16.07.09. John et Aliocha qui attendent le bus devant le château. Un verre en terrasse du Lieu Unique. ‘‘Voilà comment écrivent les poètes, des rappels de sons. Mais pourtant Shakespeare n’a pas de rimes : vers blancs. C’est la façon dont ça coule. Les pensées. La majesté.’’ Page 221. Tant que tu n’as pas fondé le nouveau foyer [un feu : la lumière, le point de lumière], tout voyage est impossible. Le voyage se pense avec un point de départ. Un aller se déploie-t-il avec la pensée d’un retour. Comment se déploie le voyage sans la pensée du retour. Aller écouter un concert le soir quai Sully.

17.07.09. Un temps avec Magali à la Maison de la Poésie dans la perspective de Midi-minuit en octobre. Un verre à Bouffay ensuite. Chez Lulu. Suis sorti sans argent. Connaître Denis. Pas de problème dit-il. Rentrer. La commune de Paris. Watkins. Ce que disent les mots peuple, prolétariat, bourgeoisie, petite-bourgeoisie, aristocratie. COMMENCER s’écrira avec ça. Faire parler les personnages. Imaginer, dès lors, leurs pensées. Leur prêter les miennes. Pas de prêt. Je ne suis pas à leur place. Je ne prête pas. Leur donner mes pensées. Me mettre sous leurs yeux. Leur donner la parole. Me donner la parole. Par eux. Faire une parole de ce que leur présence convoque en moi.

18.07.09. Réveil dans la nuit. COMMENCER. Prendre la voiture. Saint-Nazaire. Le matin. 10h00. Ouverture des expositions d’Estuaire. La présence des animaux. La présence de ton propre corps. Tu fais bouger les lignes d’une œuvre projetée au sol. Non. C’est la machine. La machine seule qui les fait bouger. Où que tu sois dans l’espace le mouvement des lignes au sol ne dépend pas de toi mais de la machine. Les fourmis, et le carnaval de Rio. Des poissons rouges, qui prennent l’avion. L’homme qui manipule. L’homme qui observe. Froid. Gris. Pluie. Seul. Retour à Nantes. Sans soleil. Chris Marker. Samura Koichi. ‘‘Qui a dit que le temps vient à bout de toutes les blessures. Il vaudrait mieux dire que le temps vient à bout de tout, sauf des blessures. Avec le temps, la plaie de la séparation perd ses bords réels. Avec le temps, le corps désiré ne sera bientôt plus, et si le corps désirant a déjà cessé d’être pour l’autre, ce qui demeure : c’est une plaie sans corps.

19.07.09. Suite de la lecture de Cercle, chez Géraldine et Michel. Géraldine, Michel, Tiphaine.

20.07.09. COMMENCER. Personnage. L’homme à la rue, jeune, discret, avec son bonnet de père Noël de plus en plus en sale. Soizic qui me dit qu’elle a vu mon sosie. Elle me donne son nom.

21.07.09. Suite et fin de la lecture de Cercle I. Chez Tiphaine. Alexandre, Aurélie, Julie, Laurent, Pierre, Soizic, Tiphaine. C’est maintenant qu’il faut prendre vie.